: Annie Berlingen
: La force du hasard
: Books on Demand
: 9782322529889
: 1
: CHF 2.40
:
: Erzählende Literatur
: French
: 374
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
Mar e est à la recherche de ses parens biologiques. Le hasard faisant bien les choses, la met sur la route d'un jeune homme intéressé par sa demande. Ils iront ensemble vers la solution de cette énigme.

Enseignante à la retraite depuis de nombreuses annés, elle a trouvé dans l'écriture un accoçmplissement intectuel et passionnant.

1 - Timothée et Louise

Il fait un temps superbe ce matin. Timothée et Louise, sa maman, disent au revoir à Georges, leur compagnon et père.

Je serai de retour dans trois semaines et je resterai plus longtemps avec vous cette fois. J'ai des jours de congé à récupérer. Au revoir mes amours et soyez sages pendant mon absence. Timothée, mon grand, je compte sur toi pour veiller sur ta maman.

Promis, papa, répond l'enfant, du haut de ses cinq ans. Georges les serre dans ses bras, les embrasse, monte dans sa voiture et disparaît en agitant la main hors de la portière.

–– J'aime pas quand il s'en va, dit le jeune enfant. Il va trop me manquer. Il lève vers sa maman un regard triste. Il serre les paupières pour ne pas pleurer.

–– A moi aussi il va me manquer mais tu sais, c'est pour nous qu'il voyage autant. Pour nous offrir tout ce qu'il faut pour que nous soyons heureux, le console Louise.

–– Je vais compter les jours et les barrer au fur et à mesure qu'ils passeront.

–– En voilà une bonne idée. Ainsi tu ne verras pas passer le temps. Viens ! Je vais te donner un calendrier. Et elle l'entraîne dans la maison, bien vide maintenant.

Fidèle à son idée, Timothée ne manque pas un seul jour qu'il barre soigneusement. Sa maman sourit en le voyant s'appliquer à tracer une croix bien droite pour le cocher. Un enfant de cinq ans. Et les jours défilent. A la date prévue prévu pour le retour du papa, tous deux ont préparé la maison ; maman a cuisiné un bon repas, celui préféré de son compagnon, fait un gros gâteau qui embaume la pièce. Ils ont revêtu leurs beaux habits et attendent dans le salon. A chaque bruit de moteur, Timothée se lève, vat à la porte. Mais, ce n'est qu'un véhicule qui passe sur la route sans s'arrêter. Le jeune garçon s'impatiente.

–– C'est pas normal, dit-il.

Tu sais, mon chéri, pour un représentant de commerce, comme l'est ton papa, il faut voyager beaucoup, se déplacer de ville en ville. C'est un métier fatigant.

–– C'est quoi un représentant de commerce, demande l'enfant

–– C'est quelqu'un qui propose et vend des produits à des commerçants.

–– Et mon papa, il vend quoi?

–– Des boissons pour les cafés, les restaurants, les hôtels.

–– Ah! C'est beaucoup de travail mais il sera bientôt de retour, n'est-ce pas, maman ?

–– Bientôt, mon amour et il a promis de rester avec nous plus longtemps.

C'est ainsi que les jours s'effilochent sans nouvelles de ce papa qui se fait désirer. Louise se veut rassurante et dit à Timothée que son papa a dû avoir un travail supplémentaire qui l'oblige à retarder son retour. Elle ne lui montre pas son angoisse, se voulant confiante. Que lui est-il arrivé ? A-t-il eu un accident ? Mais elle aurait été prévenue. A-t-il perdu la mémoire ? Se trouve-t-il dans un hôpital sans savoir qui il est, sans aucun souvenir d'elle et de son fils ? Toutes ces interrogations tournent sans arrêt dans sa tête. Quoi de plus terrible que cette impuissance devant des questions qui restent sans réponse ? Trois semaines s'écoulent dans l'attente de le voir surgir au bout de l'allée, souriant et heureux de son retour. En désespoir de cause, et après avoir téléphoné aux hôpitaux de la région, contacté les commissariats de Montpellier et de Marseille, elle se résout à téléphoner à son bureau. En lui donnant le numéro, il lui a recommandé de ne jamais l'appeler, sauf en cas d'urgence, sans donner de raison valable à cette consigne. Elle en a été très surprise mais n'a pas demandé plus d'explication.

- Peut être que son patron n'aime pas qu'on dérange ses employés pendant leurs heures de travail, pense-t-elle.

Son amour pour lui la rendant aveugle, elle ne dit rien. Avait-il quelque chose à lui cacher ? Elle décide donc de passer outre à sa consigne. Elle veut avoir des réponses.

–– Bonjour, dit-elle à la standardiste. Pourrais-je parler à Monsieur Georges Duchemin, s'il vous plaît.

–– Georges Duchemin, dites-vous ? Après un temps de silence, la voix répond. Désolée, Madame, mais nous n'avons aucun Georges Duchemin parmi notre personnel.

–– Pourtant, il m'a laissé ce numéro en cas d'urgence.

–– Vous devez faire erreur ou bien vous avez un numéro erroné, répond la personne de l'accueil. Encore navrée de ne pouvoir vous aider.

Et elle raccroche, laissant Louise désemparée, l'oreille collée à l'écouteur sans entendre la petite musique signalant la fin de la communication. Elle n'y comprend rien. Elle a le cœur dans un étau, elle manque d'air.

–– Impossible qu'il ne soit pas au bureau. J'ai dû me tromper dans les chiffres

Elle se pesuade que ce qu'elle a entendu, n'est pas la vérité. Elle saisit l'annuaire téléphonique, cherche la société où travaille Georges et contrôle le numéro. C'est le même. Cependant elle le recompose, se disant qu'elle s'est peut-être embrouillée la première fois, en tournant le cadran. Ses mains tremblent tellement.

– Société « Le Pastis de Marseille » ! Que puis-je pour votre service ?

La même voix vient de retentir dans le combiné. Elle raccroche sans répondre. Pourquoi Georges lui a-t-il donné un faux numéro? Pourquoi ce mensonge ? La question restera sans aucun doute, sans réponse. Elle demeure immobile, sans réaction, les yeux perdus dans le vide de cette existence qui s'ouvre devant elle. Elle vient de comprendre qu'elle n'existe pas dans la vie de Georges Duchemin.

Comment le dire à Timothée? Il est si jeune encore. Comment lui expliquer que son père a disparu, qu'il ne le reverra sans doute plus jamais ?

Tous les matins, en s'éveillant, il lui pose la même question.

–– Dis, maman, c'est aujourd'hui qu'il revient, papa ? Il la fixe et ses yeux sont remplis d'espoir.

Que lui répondre sinon

– Je ne sais pas, mon cœur. J'espère juste qu'il reviendra un jour et que nous serons de nouveau ensemble, tous les trois. Que va-t-il advenir de lui sans ce papa qu'il aime tant ? Comment va-t-il grandir? Et moi que vais-je faire ? Qu'allonsnous devenir sans toi, mon cœur ? souffle-t-elle en regardant la photo de Georges posée sur le bahut.

Puis soudain la colère la saisit. Elle s'empare du cadre et s'adressant à l'image, dit, d'une voix étranglée par le chagrin et la colère :

- Qui es-tu réellement Georges Duchemin ? Qui es-tu pour m'avoir trompée aussi gravement, abusé de mon amour et de ma naïveté ? Tu es sorti de ma vie sans une explication, sans un mot d'adieu, sans un appel. Si tu m'avais dit « J'en aime une autre », « Je ne veux plus de vous », ou même « j'ai une autre famille ailleurs », j'aurais compris et avec le temps, je serais passée à autre chose. Mais non ! Tu joues les abonnés absents. Tu t'es évaporé dans la nature. Et puisque tu n'existes pas, nous n'existons pas, non plus. Nous ne saurons jamais ce que tu es devenu. Sois maudit !

La rage au cœur, elle lance la photo contre le mur où elle s'écrase dans un bruit de verre brisé. Elle pleure à chaudes larmes, submergée par la souffrance et l'angoisse face à cet avenir qui se dessine et qu'elle ne parvient pas encore à imaginer. Toute sa vie qui, depuis cinq ans, tournait autour de cet homme, vient brusquement de basculer dans

l'inconnu. Et Timothée, son fils chéri, comment va-t-il réagir à cette disparition ?

Elle se laisse tomber dans le fauteuil préféré de Georges et s'abandonne à son chagrin. Dans ses larmes se mêlent à la fois sa douleur, son inquiétude et sa révolte. Comment a-telle pu ne pas se méfier de cet homme qui disparaissait des semaines entières sans donner signe de vie puis revenait s'installer dans la maison, dans son quotidien, sans autre explication que

Mon travail me prend de plus en plus de temps. Ma société vient de me confier la gestion d'un secteur encore plus grand qui me tient loin de vous. C'est triste, souvent fatigant. Mais que faire ? Le salaire est confortable et me permet de vous offrir tout ce qu'il convient à une existence calme et sans soucis...