: Thierry Joumard des Achards
: Eugène, petit atome d'hydrogène Dialogue avec une parcelle d'infini
: Books on Demand
: 9782322429714
: 1
: CHF 8.10
:
: Allgemeines, Lexika
: French
: 234
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
Cette discussion savoureuse nous permet de parcourir allègrement les 13,8 milliards d'années qui nous séparent du Big Bang. De cet éclair originel jusqu'à aujourd'hui, Eugène, un tantinet bavard, nous fait découvrir sa « vie ». De l'éclosion de l'Univers, du système solaire, de la vie, de l'apparition des premiers hommes, des civilisations et de l'Histoire, jusqu'à la place de Dieu dans toute cette aventure, cette infime particule de matière nous juge avec ironie et sans concession. C'est donc là l'occasion d'étonnantes réparties sur l'amour, le désir, le bonheur, la mort et les religions en cette chaude journée estivale sous le soleil d'Occitanie...

Thierry Joumard des Achards est originaire du sud de la France. De formation scientifique et médicale, il est passionné d'Histoire, de culture et de nature. L'écriture est pour lui un moyen de rendre accessibles et vivantes ses passions. Auteur de romans historiques et récits de voyages, il nous propose dans « Eugène, petit atome d'hydrogène » un dialogue joyeux et instructif avec un espiègle atome d'hydrogène rencontré un jour d'été...dans son verre d'eau !

— Oui, car ces extinctions n’étaient pas si négatives que ça pour tout le monde finalement.

— Facile à dire aujourd’hui au calme dans la campagne…

— Tu vas comprendre. Regarde la dernière par exemple, il y a 65 millions d’années. Nous sommes en plein royaume des dinosaures et des reptiliens. Cela fait plus de 200 millions d’années qu’ils dominent le monde sans partage. Les mammifères sont petits. Ils vivent cachés et ne sont que des proies pour les mastodontes qui arpentent ce sol. En fait, pour tout te dire, tes ancêtres ont surtout servi de casse-croûtes pour ces grands lézards…

J’ai l’impression de l’entendre rire… Ce petit rire aigu d’atome d’hydrogène qui agace.

— Tout comme nous les humains d’aujourd’hui, ils se croyaient indétrônables. Pleins de morgue et de suffisance, j’imagine.

— Effectivement. Je les ai vus, les tyrannosaures, les tricératops, les diplodocus et autres velociraptors. De belles bêtes au sang-froid. Et puis un jour… Un éclair éblouissant a illuminé le ciel. Une lueur incandescente, un choc terrible, un tremblement que j’ai ressenti alors que je me trouvais au sommet d’un conifère dans une aiguille de pin à l’autre bout de la Terre. Je revois la vague de feu avançant inexorablement avec une vitesse gigantesque et qui a embrasé toute la planète.

— Il est difficile d’imaginer aujourd’hui cette exceptionnelle violence dans un paysage aussi paisible et bucolique que celui-ci, dis-je en contemplant les nuances de vert des différentes espèces de pins s’accrochant nonchalamment à la roche blanche de la garrigue.

Sa petite voix me sort de mes rêveries.

— Ensuite, alors que je crépitais dans les flammes qui rongeaient les carcasses des sauriens, je vis un nuage sombre qui se propagea en obscurcissant le ciel de tous nos continents. Il fit nuit noire pendant des mois à cause de la poussière soulevée et des cendres crachées par les volcans réveillés sous le choc de cette météorite. La température a donc baissé d’un coup dans cette obscurité apocalyptique. Sans lumière et avec le froid, la plupart des végétaux ont dépéri. Les dinosaures herbivores ont suivi. Les si puissants tyrannosaures qui s’en délectaient se sont effondrés dans la cendre et toute la chaîne alimentaire les a suivis dans la mort. Une grande chance pour toi, Thierry.

— Une grande chance ? Pour moi ? Pour mes ancêtres « casse-croûtes » sans qui je ne serais pas là ?

— Oui, car tes ancêtres, si petits, si fragiles, terrés à l’abri dans des trous et omnivores ont survécu, eux. Cachés des flammes de la déflagration dans leurs nids et se nourrissant des déchets végétaux et animaux, ils ont traversé cette abominable période.

— Les mammifères sont donc les grands gagnants de cette rencontre « fortuite » entre la Terre et cet astéroïde.

— Sans cette roche de 10 km de diamètre lancée à plus de 40000 km/h, vous ne seriez restés que des rats nains sous la domination de gigantesques prédateurs habillés d’un type de peau dont vous faites des sacs à main aujourd’hui.

— Incroyable !

— Enfin libérés, vous voilà capables de prospérer sur cette Terre qui va devenir votre royaume, les derniers descendants survivants des dinosaures, les lézards, les crocodiles et surtout, les oiseaux, ne tenteront plus jamais de vous reprendre le pouvoir.

— L’idée d’avoir dans mon arbre généalogique un mulot m’amuse plutôt. Après les bactéries, les algues et les éponges... Nous les mettrons donc dans la galerie des portraits familiaux.

— C’est plutôt un pseudo mulot en fait. Nous sommes assez loin de « Ratatouille ». Surtout qu’à partir de cette grande extinction, les mammifères vont se développer, grandir et évoluer fortement. Le climat change, la végétation s’adapte à ces variations de températures sur des millénaires et donc tes ancêtres en font de même. Dans ta galerie de tableaux de cette époque, tu pourras rajouter nombre de sortes de musaraignes et autres petits primates.

— Ah ! Primates, dis-tu ? Je sens que là, on se rapproche de moi…

— Je suis même passé dans le tube digestif d’un des tout premiers hominidés il y a un peu plus de 7 millions d’années.

— Il ne devait pas encore s’imaginer avec un smartphone ou une tablette…

— Ça, non ! Tu aurais du mal à te reconnaître si tu le croisais dans la rue mais je t’assure pourtant qu’il est ton aïeul direct. Et tu peux en être fier car il est l’un des premiers à s’être mis debout dans la savane. Il voulait voir loin. À cette époque, il y avait une centaine d’espèces d’hominidés.

— Il y avait plusieurs espèces d’humains ?

— D’hominidés ! À mi-chemin entre le singe et l’homme. Imagines-tu l’énergie qu’il faut à la Nature pour développer un tel foisonnement d’opportunités, de pistes avortées, de voies sans issues, d’espérances déçues et de perspectives d’avenir enfin envisageables sur un des fins rameaux de l’évolution pour permettre à la conscience un jour d’apparaître dans un cerveau comme le tien ?

— Je reste sans voix… Je suis un héritier qui a eu une sacrée chance au final. N’est-ce pas que ce fut une fascinante succession d’heureux hasards pour que je sois là en cette chaude journée d’été ? Est-ce possible d’avoir autant de chance tout de même ?

— Je te vois venir… Chance ou pas chance ? Hasard et nécessité ou volonté supérieure d’un grand « Architecte » ? Je ne trancherai pas pour toi. Je ne suis qu’un minuscule atome d’hydrogène qui ne se pose pas cette question. Dieu ou pas Dieu est une interrogation d’humble mortel angoissé par l’immensément grand et l’immensément petit qui l’entourent, ainsi que par le mur sombre et inéluctable de sa propre disparition. Qu’y a-t-il après la mort ? Le néant ou le paradis ? Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien dans cet univers ? Ce sont les questionnements d’un esprit éclairé. L’amibe, l’escargot ou la sardine ne doit pas s’interroger sur ce sujet.

— L’évolution, les mutations et la sexualité sont peut-être les outils de Dieu ? Darwin était un croyant sincère après tout ! Pourquoi juger la création qu’au travers de nos repères humains ? Finalement Dieu a du temps, lui, pour faire les choses.

— Oui, moi, qui suis quasi immortel, j’enfile les millénaires et les milliards d’années comme tu regardes passer les heures et les minutes. En ce qui me concerne, à moins de rencontrer une antiparticule, je n’ai aucune chance de disparaître. Je sais juste que rien ne se perd, rien ne se crée et que tout se transforme. Je ne suis qu’une parcelle de matière sans âme ni conscience…

— Puisque tu n’en sais pas plus que moi sur la vérité ultime de notre Monde, parle-moi de ces premiers hommes.

— Il y a 4 millions d’années, j’ai aperçu, alors que je survolais l’Afrique dans un splendide cumulonimbus, les premiers humains, les Australopithèques. Ils étaient frustes et primitifs mais ils ont occupé la Terre un million d’années avant de disparaître. Leur manque d’intelligence les a empêchés de résister à l’adversité et les Homo Habilis les ont remplacés progressivement.

— Toujours cette compétition sélective.

— L’Homo Habilis est plus malin. Il invente les premiers outils et commence à agir sur son environnement. En quelques centaines de milliers d’années, il sera quand même poussé à la disparition par un homme encore plus subtil : l’Homo Erectus. Lui, apprend à domestiquer le feu. Il te ressemble de plus en plus et il perd ses poils sous la pression de la chaleur et des attaques parasitaires.

— Ce sont donc la chaleur et les parasites qui nous ont rendus glabres et qui nous ont retiré notre beau pelage simiesque ?

— Encore une adaptation pour vous protéger des nuisances thermiques et parasitaires. Ensuite, Erectus va quitter l’Afrique et partir conquérir l’Europe et...