: . Comtesse de Ségur
: Les petites filles modèles
: Books on Demand
: 9782322257485
: 1
: CHF 2.40
:
: Kinderbücher bis 11 Jahre
: French
: 215
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
Au château de Fleurville, Camille et Madeleine sont deux « petites filles modèles » qui font la joie de leur maman. Hélas, il n'en est pas de même pour la pauvre Sophie... Battue, fouettée par sa méchante belle-mère, la malheureuse accumule les sottises.

Après une enfance dans son domaine de Voronovo, Sophie Rostopchine, fille du comte Rostopchine, ministre du Tsar Paul 1er et gouverneur de Moscou, se voit dans l'obligation de fuir la Russie en 1817, et se rend avec sa famille en France. En 1819, elle épouse le comte de Ségur et c'est pendant son voyage de noces qu'elle remarquera un château,'Les Nouettes', du côté d'Aube, dans l'Orne, entouré de bouleaux qui lui rappellent le parc de son enfance. Ils auront huit enfants mais c'est véritablement pour ses petits-enfants que la comtesse va commencer à écrire, notamment quand Camille et Madeleine, héroïnes des'Petites filles modèles', partent à Londres où leur père est muté. Elle est aujourd'hui l'auteur de vingt romans connus de tous, où le bien triomphe toujours du mal, mais où le plaisir ressenti à leur lecture prouve que ses histoires traversent les générations.

V


Les fleurs cueillies et remplacées


« Mon Dieu ! mon Dieu ! que je m’ennuie toute seule ! pensa Marguerite après avoir marché un quart d’heure. Pourquoi donc Madeleine m’a-t-elle forcée de sortir ?... Camille voulait bien me garder, je l’ai bien vu !... Quand je suis seule avec Camille, elle me laisse faire tout ce que je veux... Comme je l’aime, Camille !... J’aime beaucoup Madeleine aussi ; mais... je m’amuse davantage avec Camille. Qu’est-ce que je vais faire pour m’amuser ?... Ah ! j’ai une bonne idée : je vais nettoyer et balayer leur petit jardin. »

Elle courut vers le jardin de Camille et de Madeleine, le nettoya, balaya les feuilles tombées, et se mit ensuite à examiner toutes les fleurs. Tout à coup l’idée lui vint de cueillir un beau bouquet pour Camille et pour Madeleine.

« Comme elles seront contentes ! se dit-elle. Je vais prendre toutes les fleurs, j’en ferai un magnifique bouquet : elles le mettront dans leur chambre, qui sentira bien bon ! »

Voilà Marguerite enchantée de son idée ; elle cueille œillets, giroflées, marguerites, roses, dahlias, réséda, jasmin, enfin tout ce qui se trouvait dans le jardin. Elle jetait les fleurs à mesure dans son tablier dont elle avait relevé les coins, les entassait tant qu’elle pouvait et ne leur laissait presque pas de queue.

Quand elle eut tout cueilli, elle courut à la maison, entra précipitamment dans la chambre où travaillaient encore Camille et Madeleine, et, courant à elles d’un air radieux :

« Tenez, Camille, tenez, Madeleine, regardez ce que je vous apporte, comme c’est beau ! »

Et, ouvrant son tablier, elle leur fit voir toutes ces fleurs fripées, fanées, écrasées.

« J’ai cueilli tout cela pour vous, leur dit-elle : nous les mettrons dans notre chambre, pour qu’elle sente bon ! »

Camille et Madeleine se regardèrent en souriant. La gaieté les gagna à la vue de ces paquets de fleurs flétries et de l’air triomphant de Marguerite ; enfin elles se mirent à rire aux éclats en voyant la figure rouge, déconcertée et mortifiée de Marguerite. La pauvre petite avait laissé tomber les fleurs par terre ; elle restait immobile, la bouche ouverte, et regardait rire Camille et Madeleine

Enfin Camille put parler.

« Où as-tu cueilli ces belles fleurs, Marguerite ?

– Dans votre jardin.

– Dans notre jardin ! s’écrièrent à la fois les deux sœurs, qui n’avaient plus envie de rire. Comment ! tout cela dans notre jardin ?

– Tout, tout, même les boutons. »

Camille et Madeleine se regardèrent d’un air consterné et douloureux. Marguerite, sans le vouloir, leur causait un grand chagrin. Elles réservaient toutes ces fleurs pour offrir un bouquet à leur maman le jour de sa fête, qui avait lieu le surlendemain, et voilà qu’il n’en restait plus une seule ! Pourtant ni l’une ni l’autre n’eurent le courage de gronder la pauvre Marguerite, qui arrivait si joyeuse et qui avait cru leur causer une si agréable surprise.

Marguerite, étonnée de ne pas recevoir les remerciements et les baisers auxquels elle s’attendait, regarda attentivement les deux sœurs, et, lisant leur chagrin sur leurs figures consternées, elle comprit vaguement qu’elle avait fait quelque chose de mal, et se mit à pleurer.

Madeleine rompit enfin le silence.

« Ma petite Marguerite, nous t’avons dit bien des fois de ne toucher à rien sans en demander la permission. Tu as cueilli nos fleurs et tu nous as fait de la peine. Nous voulions donner après-demain à maman, pour sa fête, un beau bouquet de fleurs plantées et arrosées par nous. Maintenant, par ta faute, nous n’avons plus rien à lui donner. »

Les pleurs de Marguerite redoublèrent.

« Nous ne te grondons pas, reprit Camille, parce que nous savons que tu ne l’as pas fait par méchanceté ; mais tu vois comme c’est vilain de ne pas nous écouter. »

Marguerite sanglotait.

« Console-toi, ma petite Marguerite, dit Madeleine en l’embrassant ; tu vois bien que nous ne sommes pas fâchées contre toi.

– Parce que... vous... êtes... trop bonnes, ... dit Marguerite, qu