: Ian Nale
: Aux Prémices de la Nuit Livre 1 : La Ronde des Corbeaux
: Books on Demand
: 9782322196456
: 1
: CHF 3.60
:
: Fantasy
: French
: 560
: Wasserzeichen
: PC/MAC/eReader/Tablet
: ePUB
Une ancienne prophétie désigne depuis longtemps le dernier Roi qui tiendra tête à la Nuit. Mais qui sera assez fort pour combattre la Mort ? Entre héros, héroïnes, Immortels, rois, reines. Les complots sont nombreux dans le royaume de Frey, les secrets bien gardés. L'heure approche où il faudra choisir son camp. Lutter pour le trône, ou lutter pour sauver le monde ?

Prophétie des Derniers Jours d’Elmer


An 658 avant Tyron Belennis

« Qu’il vous soit donné des yeux pour voir, des oreilles pour entendre. Voici la vision que, moi, Lio, Prince des Endrakis, Roi des Hommes, mets ce jour par écrit.

Alors que je rêvais, je fus transporté sur la surface des terres d’Elmer. Celui qui était se tenait devant moi. Il me vit et me dit.

— Toi qui vois, scrute ce qui t’entoure et décris-moi ce que tu aperçois.

Alors, je tournai sur moi-même et, partout où je regardai, je vis la noirceur s’immiscer. Les perles de rosée gelaient au contact de mes yeux, et les pétales qui supportaient le froid se retrouvaient dépéris pour tomber de leur support.

— Je ne constate ici que désolation et noirceur, répondis-je alors

L’être me dit.

— Toi qui entends, écoute et dis-moi ce qui te parvient.

J’écoutai et le silence m’inonda, me frappant au visage par sa présence. Le vent s’était tu et les mers avaient cessé leurs mouvements pour le laisser s’installer. Je fus pétrifié, pris d’une grande peur. Mais l’être posa sa main sur moi. Aussitôt, ma terreur se dissipa.

— Le monde est silencieux et terrifiant.

Celui qui m’accompagnait étendit les mains. Je sentis le vent surgir du silence, les mers s’agiter jusqu’à emplir le monde du son de leurs vagues. Les pétales qui avaient fané reprirent consistance, regagnèrent leur socle et, de la rosée dégivrante, de nouvelles fleurs surgirent. Plus belles encore que celles qui les avaient précédées.

— Voici ce qui fut au commencement, me dit-il. Voici la vision que fut Elmer à son premier souffle.

La joie m’emplit devant une telle beauté. Alors que je me réjouissais, un tourbillon de lumière m’amena dans un autre endroit. Celui qui est se tint face à moi.

— Toi qui as des yeux, dis-moi ce que tu vois.

J’observai. Dans la plaine où je me trouvais, je vis deux cavaliers. Le premier avait une armure aux couleurs de la nuit et, de ses orbites, des lames de feu s’échappaient. Il portait un glaive fait d’un métal sombre et indécis. Son cheval le portait, soufflant violemment sous son épaisse armure de combat.

Le second cavalier était blanc, de ses yeux aussi, des flammes sortaient. Bien que semblables à celles du premier, je ressentis qu’elles ne l’étaient en rien. Il portait une lance, et son cheval blanc semblait rayonner. Au centre de son front, un diadème aux mille couleurs. Et alors que je les voyais, ils s’élancèrent l’un contre l’autre. Le combat dura de longues minutes sans qu’aucun ne puisse avoir l’avantage. Ils s’en retournèrent bientôt chacun de leur côté, se faisant face à nouveau.

— Je vois un combat qui ne peut s’achever.

— Ce que tu vois, ce sont les Ténèbres et la Lumière, s’affrontant depuis la nuit des temps. Chacun a la même force que son adversaire, et leur combat perdurera jusqu’à ce que ce monde s’éteigne. C’est de Maldron qu’est venue la noirceur sur mon royaume. Ce qu’il fit, je ne le déferai pas, car l’homme juste ne succombera pas aux pièges de mon enfant. En cela, il se montrera digne du cadeau qui l’attend par-delà. Dis-leur à tous qu’au dernier jour, je me tiendrai aux côtés du Cavalier Blanc. Je combattrai avec lui pour écraser son adversaire, ainsi que ceux qui le suivront. Par cela, les actes de Maldron tomberont dans le néant, tout comme la putréfaction de ses mensonges sur mon domaine.

Alors, les cavaliers s’évanouirent et Celui qui est reprit.

— Toi qui as des oreilles, dis-moi. Qu’entends-tu ?

J’écoutai. Dans le chant du vent et des océans, des voix surgirent. Certaines empreintes de colère et de haine, d’autres emplies d’une tendresse infinie. Leur son me surprit tout en m’émerveillant.

— J’entends la haine, j’entends l’amour, et tous leurs dérivés.

— Ce que tu entends, ce sont les échos de ceux qui peuplent Elmer. Ils sont colère et rage pour certains, mais joie et tendresse pour beaucoup. Par eux, j’ai consacré le sol de ma fille. En eux, elle ressent à chaque instant combien ce que j’ai fait peut être bon.

Un nouveau tourbillon m’emporta. Cette fois-ci, je me trouvai seul et désolé. Un grand froid s’était emparé de mon corps et je frissonnai. Celui qui sera apparut, mais il n’était pas comme les deux êtres précédents. Il portait une armure aux couleurs du ciel. Dans sa main, un glaive où le mot Justice était inscrit en lettres d’or. Sur son front, une couronne forgée dans de l’or blanc. Splendide et terrifiant à la fois. Un court instant, j’en eus peur. Il était le Dieu Vengeur dans toute sa magnificence.

— Celui qui est demeuré Juste ne craindra pas ce moment, me lança-t-il. Que vois-tu ?

Cette vision me hantera jusqu’à mon dernier souffle. De la beauté d’Elmer, il ne restait rien. Le feu s’immisçait sur les champs jusqu’à les consumer. Dans les cieux, les éclairs déchiraient la voûte du monde pour fracasser les arbres qui restaient debout. Je regardai mieux. Il demeurait un arbre, que le ciel frappait de ses flammes, mais qui ne tombait pas. Ses branches étaient des lames. Avec elles, il déviait les éclairs, les faisant retomber sur ses côtés. Sa base resplendissait d’une lueur étrange, mais apaisante. Le ciel se déchaînait envers lui, ne parvenant pas à le faire plier. Pourtant, après un moment, les cieux en furie eurent raison du résistant et, le touchant à sa base le firent tomber sur le sol noir d’Elmer. Je vis d’autres arbres, semblables au premier, qui avançaient vers leur frère vaincu. Un seul différait, sur son tronc, le nom d’Ananiël était inscrit. Le ciel s’acharna sur eux aussi, mais il ne pouvait rien faire. Leurs branches faites de lames frappaient le ciel de leurs épées sans reculer. Bientôt, l’orage diminua en intensité, sous les nombreux coups qu’il avait reçus. Celui qui se nommait Ananiël asséna le dernier coup, et l’orage disparut définitivement. Une pousse émergea de la souche du premier arbre tombé, resplendissante sous le soleil qui réapparaissait. Ceux qui avaient repoussé l’orage la virent et, se plaçant autour d’elle, formèrent un cercle afin de la protéger contre toute nouvelle attaque. La vision disparut à mes yeux et je ne sus quoi penser.

— Que représente l’arbre ? demandai-je perplexe.

— Il représente celui qui vient le Premier, il s’est élevé dans les poussières et la misère jadis, car nul autre arbre ne l’a reconnu comme l’un des leurs. Par lui surgira un espoir, et ceux qui le suivent combattront comme lui pour défaire la Nuit et le Feu. Je placerai une nouvelle lueur dans les cieux afin qu’il soit reconnaissable de tous. Sa venue se fera sous l’eau rouge et sous le sang doré. Beaucoup voudront sa perte, mais aucun n’y parviendra. Il est celui qui vient, celui qui était. La Nuit sera son fardeau un temps, pourtant, il ne perdra pas espoir. L’arbre rouge va fleurir une ultime fois pour annoncer le temps de son couronnement. Il devra tomber afin qu’une pousse plus grande encore puisse renaître. Lorsque cela sera, tous verront le dernier Roi se lever.

Il me faut préciser à cet endroit que cette vision, bien que transcrite en langage des Hommes, m’a été confiée dans l’Ancien langage, Celui qui fut utilisé bien avant le monde actuel. « Le Dernier Roi » retranscrit dans ce langage se dirait ainsi : « Toêti ». Il est important de noter que l’Ancien langage ne permet pas de genre, aussi Toêti pourrait se traduire par la dernière Reine.

— Et quel but aura celui qui se prénomme Ananiël ?

— Il assènera le coup fatal, m’expliqua mon guide. Le rejeton infâme de Maldron doit mourir de sa main. Comme il acheva Maldron au temps des Sables Ensanglantés, il mettra à terre la Bête. Alors, et seulement alors, Elmer pourra vivre en paix. Il vous faut comprendre que le destin du dernier Roi et le sien demeurent liés. L’un sans l’autre, ils ne viendront pas à bout de la Nuit.

— Ce guerrier, qui est-il ? interrogeai-je.

— Il est Immortel. Il est Homme. Pourtant, il n’est ni l’un ni l’autre. Mais ne t’inquiète pas, je vous donne ici de quoi le trouver. Le Corbeau s’en est épris, avant que la graine ne dépérisse et...