Les cabanes
Les enfants étaient en vacances, et tous avaient congé ; les papas et les mamans avaient déclaré que, pendant six semaines, chacun ferait ce qu’il voudrait du matin au soir, sauf deux heures réservées au travail.
Le lendemain de l’arrivée des cousins, on s’éveilla de grand matin.
Marguerite sortit sa tête de dessous sa couverture et appela Sophie, qui dormait profondément ; Sophie se réveilla en sursaut et se frotta les yeux :
« Quoi ? qu’est-ce ? Faut-il partir ? Attends, je viens. »
En disant ces mots, elle retomba endormie sur son oreiller.
Marguerite allait recommencer, lorsque la bonne, qui couchait près d’elle, lui dit :
« Taisez-vous donc, mademoiselle Marguerite ; laissez-nous dormir ; il n’est pas encore cinq heures ; c’est trop tôt pour se lever.
Marguerite
Dieu ! que la nuit est longue aujourd’hui ! quel ennui de dormir ! »
Et, tout en songeant aux cabanes et aux plaisirs de la journée, elle aussi se rendormit.
Camille et Madeleine, éveillées depuis longtemps, attendaient patiemment que la pendule sonnât sept heures, et leur permît de se lever sans déranger leur bonne, Élisa, qui, n’ayant pas de cabane à construire, dormait paisiblement.
Léon et Jean s’étaient éveillés et levés à six heures ; ils finissaient leur toilette et leur prière lorsque leurs cousines se levaient.
Jacques avait eu, avant de se coucher, une conversation à voix basse avec son père et Marguerite ; on les voyait causer avec animation ; on les entendait rire ; de temps en temps Jacques sautait, battait des mains et embrassait son papa et Marguerite ; mais ils ne voulurent dire à personne de quoi ils avaient parlé avec tant de chaleur et de gaieté. Le lendemain, quand Léon et Jean allèrent éveiller Jacques, ils trouvèrent la chambre vide.
Jean
Comment ! Déjà sorti ! À quelle heure s’est-il donc levé ?
Léon
Écoute donc ; un premier jour de vacances on veut s’en donner des courses, des jeux, des promenades. Nous le retrouverons dans le jardin. En attendant mes cousines et nos amies, allons faire un tour à la ferme ; nous déjeunerons avec du bon lait tout chaud et du pain bis.
Jean approuva vivement ce projet ; ils arrivèrent au moment ou l’on finissait de traire les vaches. La fermière, la mère Diart, les reçut avec empressement. Après les premières phrases de bonjour et de bienvenue, Léon demanda du lait et du pain bis.
La mère Diart s’empressa de les servir.
« Allons, la grosse, cria-t-elle à une lourde servante qui apportait deux seaux pleins de lait, donne du lait tout chaud à ces messieurs. Passe-le... Plus vite donc ! Est-elle pataude ! Faites excuse, messieurs, elle n’est pas prompte, voyez-vous. Pose tes seaux ; j’aurai plus tôt fait que toi... Cours chercher un pain dans la huche... Voilà, messieurs ; à votre service tout ce qu’il vous plaira de demander. »
Léon et Jean remercièrent la fermière et se mirent à manger avec délices ce bon lait tout chaud et ce pain de ménage, à peine sorti du four et tiède encore.
« Assez, assez, Jean, dit Léon. Si nous nous étouffons, nous ne serons plus bons à rien. N’oublie pas que nous avons nos cabanes à commencer. Nous aurons fini les nôtres avant que ce petit vantard de Jacques ait pu seulement commencer la sienne.
Jean
Hé, hé Je ne dis pas cela, moi. Jacques est fort ; il est très vif et intelligent ; il est résolu, et quand il veut, il veut ferme.
Léon
Laisse donc ! ne vas-tu pas croire qu’il saura faire une maison à lui tout seul, aidé seulement par Sophie et Marguerite ?
Jean
Je n’en sais rien ; nous verrons.
Léon
C’est tout vu d’avance, mon cher. Il fera chou blanc.
Jean
Ou chou pommé. Tu verras, tu verras.
Léon
Ce que tu dis là est d’une niaiserie pommée. Ha ! ha ! ha ! Un peti